EN GUINEE CONAKRY

Qui sait où est la Guinée Conakry? Trou noir de notre mémoire coloniale, elle jouit de terribles paradoxes. Personne n'en parle jamais et pourtant elle fournit  le premier contingent des migrants mineurs ( MNA)  en France.  Ses richesses sont immenses: bauxite, métaux rares, minerais précieux, terres agricoles fertiles, paysages variés: nature tropicale, mer, montagnes, forêts, culture originale,  artisanat et créativité en tout genre: musique, danses, peinture. Elle pourrait être un paradis sur terre, les pilleurs en tout genre et de tous continents en ont fait un "enfer".

Sur un territoire équivalant à la moitié de la France, la population, de 12 millions d'habitants  vit majoritairement à Conakry et dans les grandes villes. La misère est  intense, la corruption généralisée, le désespoir envahissant. L'absence de perspectives plombe les bonnes volontés, la jeunesse vaque et rêve d'une Europe idéalisée. Un régime prédateur essaie de se maintenir au pouvoir, coûte que coûte. Les émeutes réprimées à balles réelles se sont succédé avec l'annonce faite par le Président Alpha Condé de prolonger ses mandats en réformant la Constitution. 

Un front national de défense de la Constitution regroupe( FNDC) tente de constituer une opposition qui dépasserait les clivages ethniques et sociaux.

Quatre grandes ethnies sont réparties sur le territoire: les Peuls, les Malinkés, les Soussous, les Forestiers. 

 

 

 

 

 

Carte de la GUINEE CONAKRY, pays bordé  par l'Océan atlantique et 6 pays africains. 

Conakry

Une Métropole de 36 kms de longueur, souffrant de façon exacerbée des mêmes maux que ses homologues africaines: étirement urbain (accentué par sa configuration de presqu'île) opacité du foncier, absence de transports en commun,  embouteillages monstres, pollution, insalubrité, absence de services public: pas d'eau courante, électricité sporadique, système de santé défectueux... inégalités spatiales scandaleuses. Tout concourt au ressentiment et aux tensions.  

Scènes de la rue

LES FEMMES

Dans le quartier Kipé, pourtant réputé pour sa tranquillité et son relatif confort,  

les femmes font la lessive devant leur maison.

Alors que la Guinée est le château d'eau de l'Afrique de l'ouest, l'eau courante n'est pas accessible. 

Elles font aussi les repas: riz et fonio sont préparés dans des amoncellements de bassines. 

Dans les quartiers plus populaires, pour contrer la misère,  les wahhabites proposent aux maris guinéens de voiler leurs femmes de noir. Même si ce n'est ni seyant,ni pratique sous la chaleur,  cela rapporte quelques sous à la famille. 

Pourtant l'islam d'ici résiste.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les belles dames élégantes se rendent à la Mosquée le vendredi. 

La Mosquée Dadia du quartier Kipé.

SCENES DE RUE

La rue est un lieu dangereux, mieux vaut regarder ses pieds pour éviter les fondrières où stagnent les immondices.

D'ailleurs certaines toubabs  insouciantes  en ont fait les frais. Jeanne et Maryse chez le docteur Barry. 

Maryse et une spectatrice belge au Cirque Tinafan. 

Scènes de la vie quotidienne à Conakry.

Piétons, voitures, taxis, motos, taxi- motos, touk-touks, mini bus,charrettes, vendeurs ambulants y slaloment parfois avec élégance, souvent avec véhémence. 

Sous l'oeil impuissant des agents de la circulation.

Il se produit parfois des accidents.

Tout se vend à Conakry. Le commerce informel permet aux familles de survivre. 

Un vendeur ambulant 

Le marché de Kaporo

Au marché, Jeanne la toubab de Guinée Solidarité

Le charbon de bois reste le moyen le plus sûr pour cuisiner. Son commerce permet aux plus pauvres d'acheter du riz. Les coupes claires  dans la végétation causent de  véritables désastres écologiques. 

Les fabricants de meuble à Ratoma; un des quartiers de Conakry. Un show room à ciel ouvert. 

CHANGER LA VILLE? 

Une solution, prônée par les chinois: un nouveau quartier : un "condo" pour classes aisées avec piscine et enceintes sécurisées. 

Sur les programmes de vente: on passerait de ça à ça.

Un rêve que voulaient poursuivre les colonisateurs français....

Ils ont bâti la presqu'île pour l'exportation et le commerce.

Les sculptures du Musée national témoignent encore de leurs efforts.

Les Iles de Loos

Le port de Conakry

Port de pêche de Conakry 

Embarquement vers les Iles de Loos

Les pirogues servent au transport et au ravitaillement vers les Iles. 

Le port est aussi prisé des étrangers: les chinois viennent pêcher dans les eaux territoriales, Bolloré y a installé ses constructions insolentes de modernité pour y exporter la bauxite. 

Flotte de pêche chinoise retenue au mouillage à                     Port Bolloré

quelques encablures du port de Conakry.

Le contrat sino-guinéen n'a pas été renouvelé.

Trop de dégâts.

                                                                                              

 

L'entrée du Port Bolloré devant le Ministère des Affaires étrangères. 

Une noria ininterrompue de camions déverse les marchandises précieuses. 

Ile de Kassa

A une demi heure de pirogue  de Conakry, les plages aménagées  de Kassa semblent  un paradis pour touristes locaux et étrangers. 

La plage est propre et de jolis bungalows donnent enfin l'occasion  de profiter des Tropiques. 

Fin de weekend. Les pirogues rembarquent  les touristes. Le trafic reprend, sur la mer cette fois. 

SEULS 

 Devant la Case au lever du soleil, le sentiment d'être sur une île déserte. 

Entre mer et ciel, un trait d'union: la pirogue bleue comme l'éternité. 

Le village de pêcheurs de Kassa

Les travailleurs de la mer vivent dans une extrême pauvreté sur le port de Kassa.

Un contraste saisissant avec les zones touristiques toute proches.

Un cours d'aquarelle improvisé

Malgré tout, difficile de résister au croquis et à la photo. Pourquoi la misère est-elle toujours si pittoresque?

Après nous avoir fait remarquer qu'il manquait le panneau solaire sur le croquis, les jeunes et les enfants, ébahis,  fixent  ma palette. Premier cours de dessin pour Maly. Il a 20 ans, n'est jamais allé à l'école, mais il tient à m'offrir sa signature. 

Le sourire radieux de Maly Laye Bangoura 

En miroir, le sourire  des enfants découvrant leur portrait. Un bel échange!

En route pour le Fouta Djalon

Dans le Fouta vivent les peuls, une ethnie prospère mais  ostracisée par le Régime. Les émeutes y sont fréquentes. En cette période agitée, la répression est féroce. 

 

 

 

 

Quatre morts à Labé, dont le chauffeur d'une ambulance tué à bout portant. 

Un article de Lynx, un journal guinéen. 

 

 

 

 

 

 

Notre séjour, ponctué d'arrêts et de confinement sera écourté. Le danger est trop grand. Impossible de rejoindre Mali situé près de la  frontière sénégalaise. 

On s'organise. 

La route

Sans commentaire....

Un village peul typique du Fouta. Chaque case est une unité de vie pour la famille

Diaby, notre technicien, entouré des enfants stupéfaits de voir 3 blancs.

DALABA

A la rencontre de la famille d'Ousmane. 

 Ousmane  est un jeune MNA arrivé à Bordeaux il y a 2 ans, après un éprouvant  parcours en Afrique: Niger, Algérie, Maroc et en  Méditerranée.

Il avait choisi l"aventure"  et  raconté à sa mère qu'il allait laver son linge au marigot. Il n'a donné de ses nouvelles que 6 mois après son départ, une fois arrivé au Maroc. 

 

Les retrouvailles avec la famille sont  émouvantes. 

Jeanne et Maryse avec la maman d'Ousmane. 

Les femmes de la famille

La famille d'Ousmane en admiration devant le sac à l'effigie du fils prodigue.

Les soeurs, cousins, cousines  posent  pour fêter notre arrivée. 

Cocodal, la coopérative des cordonniers où travaille la famille

La tante tient un restaurant où nous dégustons du riz sauce feuilles au Manioc

Dalaba: une ville chargée d'histoire.

La Case des palabres

 

Dans ce palais construit, sur le modèle des cases traditionnelles  par les colonisateurs, se sont réunis longtemps les chefs peuls.

La circularité assurait l'égalité.

 

C'est ici que la Guinée a opté pour  son indépendance en 1958.

Le plafond est recouvert des traditionnels "léfas" en vannerie.

La Case de Myriam Makeba, offerte à la chanteuse par Sékou Touré. Elle est maintenant à l'abandon.

La rue principale de Dalaba est encore bien tranquille en cette veille de manifestations; Les Imams ont réuni les jeunes de la ville pour les exhorter au calme.

C'est sous le Kouratier, l'arbre à palabres qui surplombe la vallée, que se discute l'avenir des communautés. Il y fait très frais.

La végétation du Fouta, quelque peu dégradée par les feux de forêt, apporte cependant ombre et sérénité.

Un confinement inattendu. Un havre de paix dans le déchainement des colères. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Aujourd'hui 22 Janvier 2020, Jour de protestation à Dalaba, comme dans tout le pays.

L'appel au calme des religieux a eu peu d'impact sur la colère des émeutiers. La police tire. Les manifestants menacent de tuer le préfet. La prison est brulée, les prisonniers  politiques de droit commun et les politiques s'évadent en volant les armes de la gendarmerie. La rumeur enfle, ils s'en prennent aux bâtiment publics. L'université est cambriolée. Un détachement de l'armée  est dépêché de Conakry.. le Fouta est militarisé.

Nous restons confinés pendant trois jours dans le centre de Soeur Rose. Derrière les hauts murs de notre refuge, les tirs continuent. Des effluves de gaz lacrimogène, âcres et irritants couvrent les senteurs des fleurs.

A l'intérieur, auprès des bougainvilliers, on prend son mal en patience.

Les petits, Paul et Charles, un peu effrayés viennent chercher du réconfort. Ils ont peur du sang qui pourrait couler, leur papa travaille au Cameroun, ils n'aiment pas les émeutes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le confinement permet quelques loisirs, notamment le dessin dans le verger des soeurs.

 

Retour sur Conakry

Dommage pour le Fouta. La prudence et les consignes de l'ambassade imposent  le retour précipité vers Conakry.

Mieux vaut franchir les barrages dans la journée.

Et ne s'arrêter que pour admirer l'artisanat peul et les jolis bébés.

Après 39 barrages érigés par les émeutiers et 7 par  la gendarmerie, une halte s'impose. Les perles d'eau du  "voile de la mariée"  rafraichissent les voyageurs harassés.

 Les bambous profitent aussi du site pour se déployer en couronne.

Un sculpteur ascétique a installé sa case atelier sur un rocher pour la peupler de figures tutélaires. Au milieu trône la Nimba, femme et  mère féconde, symbole de la Guinée.

Mais, il faut vite repartir.

A peine a-t-on le temps de croquer quelques scènes entr'aperçues, la route est encore longue quand on arrive à Kindia.

Juste avant le Pont de Kâkâ se forme un embouteillage spectaculaire. Un camion s'est mis en travers de la route. Les policiers sont partis en courant, un chinois a pris les choses en main. Une heure  plus tard la circulation chaotique reprend.

Il aura fallu 12 heures pour parcourir, entre nids d'autruche  et trous béants, 500 kms.

 Le pont de Kâkâ, des rumeurs courent sur les cordes qui pendent sous le pont. 

On dit que maintenant,  on y pend les chiens.

Plus que 4 heures et nous arrivons à Conakry à la tombée de la nuit!

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